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Perlicules
12 mai 2014

Hamoun : scènes de ménage et show à la perse

Réalisateur : Dariush Mehrjui

Pays : Iran

Année : 1990

Hamoun

Il y a du Fellini dans l’ouverture de ce film qui commence par un rêve. Un rêve dans lequel Hamoun, représentant de commerce iranien, se retrouve à marcher dans la campagne, au bord de la mer, entouré de nains attifés de costumes de la Renaissance italienne ainsi que « de gens que je connais et d’autres que je ne connais pas », tous élégamment vêtus de blanc. La petite compagnie, se promenant comme au retour d’un déjeuner sur l’herbe, arrive au pied d’une colline au sommet de laquelle se dresse un écran géant. Les promeneurs s’y voient eux-mêmes et s’observent jusqu’à ce que surgisse, de derrière la colline, un démon noir comme la suie…

Prologue étonnant pour un film au ton pourtant résolument réaliste. Hamoun lit Kierkegaard sur son balcon et prépare une thèse sur l’amour chez Abraham. Il est en instance de divorce mais ne parvient pas, malgré les conseils de son avocat et ami, à accepter cette rupture. Son épouse, issue d’une famille plus riche que lui, est persuadée d’être une grande artiste peintre et considère que son mariage étouffe son talent et les opportunités qu’elle pourrait avoir d’être reconnue à sa juste valeur. Procédant par flashbacks, le réalisateur nous ramène en arrière, du temps de la séduction et de l’idylle jusqu’à celui des premières fêlures, avec l’irruption d’un psychothérapeute grotesque qui convainc la jeune femme de voler de ses propres ailes. Hamoun, désemparé, part à la recherche du vieil Ali, son ancien maître à penser, seule personne dont il espère un conseil salutaire.

Du cinéma iranien, le public européen ne connaît souvent que des films misérabilistes présentant les strates les plus défavorisées de la société ou des films à vocation dissidente sur le plan politique (comme Les Chats Persans ou Persepolis). Hamoun est tout autre : il ne délivre aucun message idéologique et si on traverse les fameux bazars durant l’une ou l’autre scène, il prend pied dans la classe moyenne, celle d’une petite bourgeoisie lettrée et relativement libérale sur le plan des mœurs. Les références à la religion sont rares : la servante de la maison est voilée et muette mais la femme d’Hamoun se consacre aux beaux-arts et s’abandonne à des crises mystiques qui ont bien peu de rapports avec l’islam chiite. Il n’en est pas moins typé par d’autres aspects, comme dans ces dialogues très vifs, entre le héros et son avocat notamment, qui se déploient sur un registre de virulence vocale et corporelle qui paraitrait incongrue, par exemple, dans un film français. Les références constantes au sacrifice d’Abraham (Hamoun tente d’abattre son épouse en espérant que la main de Dieu retiendra sa main au moment ultime) ainsi que le son hypnotique de l’harmonium revenant sans cesse dans la bande originale contribuent à donner à ce film une ambiance particulière qui m’a incité à le faire figurer parmi mes perlicules.

 

Voir la bande-annonce 

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